EuroBusiness Media (EBM) : Bureau Veritas, leader mondial de la certification Qualité, Santé-Sécurité et Environnement vient de s’introduire en bourse. Frank Piedelièvre, bonjour. Vous êtes le Président de Bureau Veritas : en quelques mots, quel est le métier de Bureau Veritas et son positionnement dans son secteur d’activité ?
Frank Piedelièvre (FP) : Nous avons un métier de service, d’évaluation de conformité, qui vise à donner à nos clients l’assurance que leurs produits, leurs usines, leurs bateaux, leurs avions sont conformes à des règles, à des standards, à des normes et qu’à la fin ils sont sûrs. Nous sommes au fond quelqu’un qui apportons de la sureté, de la confiance dans le monde économique d’aujourd’hui, et dans un monde qui se globalise de plus en plus. C’est la raison pour laquelle cette entreprise est présente, partout dans le monde, dans 140 pays, au travers de près de 800 bureaux et laboratoires, pour précisément apporter à ses clients ses services d’inspection, de testing, de certification, d’évaluation pour tout ce qui concerne leurs actifs, leurs produits et quelquefois même leurs personnels.
EBM : En quoi votre secteur d’activité est il porteur pour les investisseurs sur le moyen terme ?
FP : C’est un secteur d’activité qui a la chance d’avoir des opportunités multiples : tout d’abord le marché mondial se globalise. Ca veut dire que les centres de fabrication des produits bougent et que ceux qui les importent, ceux qui les achètent, ceux qui les montent, ceux qui les distribuent doivent sans cesse s’assurer que les fabricants sont bien des gens sérieux qui fabriquent selon des normes et que, quand ils mettront sur le marché un produit ou quand ils construiront une usine, cette usine ne créera pas pour l’entreprise des risques ou pour les consommateurs ou pour ceux qui seront transportés sur des bateaux, sur les avions. Ainsi, le marché est un marché qui est en expansion permanente : il y a l’évolution des normes, il y a la multiplication des réglementations en matière de sécurité, en matière d’environnement, en matière de santé et d’hygiène pour tous ceux qui travaillent dans les entreprises. Il y a également la globalisation des échanges, l’augmentation du commerce : tous ces éléments là font que le métier de Bureau Veritas est un métier porteur, et sera porteur à notre avis pour longtemps.
EBM : Pourquoi avez-vous décidé de venir sur le marché aujourd'hui par le biais d'une introduction en bourse ?
FP : Nous avons pensé qu’une entreprise comme la notre (plus de 31.000 collaborateurs) est une entreprise qui doit avoir une marque mondiale. La marque c’est très important dans notre métier, c’est synonyme de confiance : les gens viennent chez nous parce que la marque, la notoriété sont des éléments clefs. Et nous sommes finalement assez peu connus en dehors de l’Europe, et donc nous avons pensé que la cotation était un vecteur de notoriété qui était très important pour notre entreprise. C’est un premier point. Deuxième point, c’est que nous avons besoin d’attirer des compétences, nous avons besoin de retenir des collaborateurs et nous engageons chaque année plusieurs milliers de nouveaux collaborateurs. Pour ce faire il faut que les gens se disent : « Bureau Veritas, c’est le groupe d’avenir où j’ai envie de faire ma carrière professionnelle ». Le monde entier est la recherche d’ingénieurs, de techniciens. Pour qu’ils viennent chez nous, il faut que nous soyons visibles, il faut qu’ils sachent que l’entreprise est l’un des leaders mondiaux. Et ceci, la bourse peut évidemment nous faciliter cette attractivité que nous voulons. Et puis enfin, comme nous grandissons et comme nous sommes dans un monde qui se consolide, une industrie qui se consolide rapidement ; nous avons fait près de 50 acquisitions, nous essaierons d’en faire plusieurs dizaines d’autres dans les années qui viennent ; bien sûr la bourse est aussi un moyen de se procurer des moyens financiers pour consolider un marché qui est encore très largement éclaté.
EBM : Comme vous l’évoquez, l'introduction en bourse, typiquement, peut servir à doter une entreprise des moyens de son développement. Quel est aujourd'hui votre plan de développement, et passe-t-il nécessairement par une phase de croissance externe ou d’acquisitions?
FP : Nous avons toujours depuis 10 ans organisé notre croissance, qui a d’ailleurs été depuis plus de 10 ans --12 ans maintenant – de 15% par an chaque année, à la fois par la croissance organique dans les marchés qui se développent – de l’ordre de 8 à 9% par an en moyenne – et puis par des acquisitions régulières qui nous ont permis d’augmenter ce chiffre d’affaire de plus de 7% par an. C’est cette combinaison d’acquisitions et de croissance organique, qui est un modèle assez vertueux, qui nous a permis de nous implanter là où nous n’étions pas, rapidement, en ayant tout de suite une plate-forme de croissance, des compétences, des reconnaissances : nous sommes dans un métier où il faut être accrédité dans bien des cas. Et ces acquisitions vont se poursuivre, parce que de plus en plus les entreprises nationales, locales voire régionales réalisent qu’ils ne peuvent plus servir leurs clients comme avant, car lesdits clients ont besoin de partenaires qui les accompagnent partout où ils ont des opérations, partout où ils achètent, partout où ils veulent se développer. C’est la raison pour laquelle on constate aujourd’hui l’accélération de la consolidation du marché.
EBM : On note que votre actionnaire principal Wendel conserve les deux tiers du capital après l'introduction en bourse. Est- ce que cela change la nature de votre partenariat ?
FP : Wendel est chez nous depuis près de 12 ans, nous a accompagné, nous a toujours encouragé, nous a donné des conseils : cela a été un partenariat formidable qui, je dois le dire, s’est déroulé sans nuage. Aujourd’hui Wendel nous a permis d’aller en bourse, on a d’ailleurs beaucoup poussé pour cette introduction en bourse au niveau de l’équipe de direction de la société, et Wendel a l’intention de rester durablement notre actionnaire de référence. Ce partenariat, nous pensons qu’il restera le même, avec la même confiance, avec les mêmes échanges ; bien sûr dans le cadre de la réglementation telle qu’elle est doit être appliquée maintenant que nous sommes une société cotée.
EBM : Enfin, pour conclure, quelles sont les perspectives financières 2007-2008 que vous souhaiteriez communiquer aux investisseurs, au marché, pour ceux qui découvrent aujourd'hui le dossier Bureau Veritas ?
FP : Nous avons une ambition assez forte, puisque nous visons entre 2006 et 2011 à doubler le chiffre d’affaire de l’entreprise, et puis également d’augmenter la rentabilité de puisque nous sommes une entreprise finalement assez jeune : dans bien des pays, nous savons quelques années d’existence, nous avons lancé de nouveaux métiers. Ces métiers vont continuer de se développer, vont atteindre la taille critique, vont améliorer leur efficacité opérationnelle. Et la conséquence de tout cela c’est que nous visons, sur les années 2007 à 2011, à croître notre bénéfice net de 15 à 20% par an. Je crois que c’est un objectif assez ambitieux, mais qui est celui, finalement, dans la continuité de ce que nous avons fait depuis 12 ans.
EBM : Frank Piedelièvre, Président de Bureau Veritas, je vous remercie.
FP : Merci.