EuroBusiness Media (EBM): Groupama, l’un des principaux assureurs mutualistes européens publie ses résultats pour le premier semestre 2010. Christian Collin, bonjour.
Christian Collin (CC): Bonjour.
EBM: Vous êtes directeur Général Finance et Risques de Groupama. Quels sont vos commentaires sur les chiffres de ce premier semestre 2010 ?
CC: Je crois que le premier semestre 2010 se caractérise par une croissance soutenue de notre activité, cela d’ailleurs tant en France qu’à l’international. En France, nous gagnons des parts de marché en assurance de biens et de responsabilité. Nous maintenons nos parts de marché en assurance de la personne, notamment en épargne retraite individuelle. A l’international, nous renouons avec la croissance avec une surperformance sur les principaux marchés sur lesquels nous exerçons, notamment en Italie, en Hongrie ou encore en Espagne.
Au plan des résultats naturellement, notre résultat du premier semestre est impacté par la tempête Xynthia. Nous avons réglé à nos assurés 200 millions d’euros dans des délais d’ailleurs très rapides à nos assurés nos clients, nos sociétaires. Le coût net pour le groupe après réassurance et après impôts est de 75 millions d’euros. Je crois que ce qui est encourageant, ce qui est satisfaisant, c’est que malgré cette sinistralité élevée, malgré un contexte de crise financière, le groupe réussit à sortir un résultat positif de 127 millions d’euros et obtient une marge de solvabilité de 153 %, ce qui montre la robustesse de Groupama.
EBM: Quels sont les principaux faits marquants du premier semestre pour Groupama ?
CC: Je crois qu’en 2010, nous portons tous nos efforts sur l’amélioration de notre performance et de notre efficacité opérationnelle et cela à plusieurs niveaux. En France, au-delà de la poursuite des programmes d’optimisation des processus et de la poursuite des efforts de réduction des coûts et des mutualisations d’activités à l’intérieur du groupe, nous avons vraiment concentré nos efforts sur les conséquences de la fusion de nos sociétés Vie en une société unique, la société Groupama GAN Vie, avec une finalité qui est claire, c’est de disposer d’une plate-forme de gestion vraiment industrialisée, moderne au service de nos cinq réseaux naturellement mais également au service, pourquoi pas, de partenaires extérieurs futurs comme nous le faisons d’ailleurs avec Amaguiz en assurance dommages. Nous avons, à l’international, concentré nos efforts sur la finalisation de l’intégration de nos filiales récemment acquises et nous avons développé de nombreuses synergies et des plates-formes régionales.
Je crois qu’au-delà de cet effort sur la performance, nous avons également investi dans la distribution et notamment noué des partenariats qui sont tout à fait prometteurs, partenariats d’abord avec le groupe Casino, qui est désormais opérationnel depuis le mois de juin et qui permet la commercialisation de contrats d’assurance dans les magasins de ce groupe en liaison avec la banque Casino. Un partenariat dont on a beaucoup parlé avec la Banque Postale : ce partenariat sera opérationnel à la fin de l’année 2010. Naturellement, nous avons également développé des partenariats avec des gens qui sont proches de nous, les institutions de prévoyance et de retraite, notamment l’institution Agrica mais également Pro BTP. Nous avons également développé de nombreux partenariats à l’international et j’en prendrai un à titre d’exemple, c’est celui qu’a conclu notre filiale roumaine avec Renault Dacia.
Nous avons également investi dans le direct, dans la commercialisation de contrats d’assurance sur le web. Vous connaissez Amaguiz que nous avons lancé maintenant il y a un peu plus de deux ans. Cette société se développe très vite et très au-delà de notre business plan lors de la création avec désormais 72 000 contrats en portefeuille. Et ce savoir-faire que nous avons acquis avec Amaguiz, nous envisageons de l’exporter dans un certain nombre d’autres pays.
EBM: On connaît l’opposition de Groupama à la norme Solvabilité 2. Où en êtes-vous dans la préparation de sa mise en place ?
CC: Je crois qu’effectivement, vous dites que vous connaissez la position de Groupama. Groupama, effectivement, a toujours émis des réserves sur ce projet. Non pas sur le principe, d’ailleurs, de Solvabilité 2 qui repose sur une évaluation d’un capital économique nécessaire en fonction des risques qui sont supportés par l’entreprise, que ce soit des risques d’actif ou de passif. C’est un système non contestable. En revanche, ce sont les modalités d’application sur lesquelles nous nous sommes battus et sur lesquelles nous continuons d’ailleurs un lobbying avec la profession. Un des problèmes majeurs de ce projet, c’est l’évaluation du capital économique nécessaire en face des risques qui repose sur un principe, sur une règle, cette règle c’est la valeur en risques sur un horizon d’un an. Et cet horizon d’un an, il est, de notre point de vue, totalement incompatible avec l’exercice du métier d’assureur qui a pour habitude de gérer des passifs sur le long terme comme par exemple la construction, la responsabilité civile ou encore la retraite.
Ceci étant, cette directive a été votée il y a maintenant plus d’un an, et, par conséquent, nous avons pris la décision de travailler de façon très volontariste pour être prêts lors de la mise en œuvre effective de Solvabilité 2. Nous travaillons à plusieurs niveaux. J’ai d’abord constitué une équipe de 16 personnes avec un budget conséquent pour développer un modèle interne qui permettra d’optimiser nos fonds propres. Nous travaillons de façon active également sur les résultats de la cinquième étude quantitative d’impact qui devront être communiqués au superviseur européen au mois d’octobre.
Et puis, point important, au-delà de la partie quantitative de Solvabilité 2, c’est tout le volet de ce qu’on appelle le Pilier 2 qui concerne la gestion des risques et le contrôle interne et là, nous investissons également beaucoup. Nous avons pris une entreprise pilote au sein du groupe. Nous allons dérouler les processus, la gouvernance nécessaire et en harmonie, en conformité avec le Pilier 2, avec donc une entreprise du groupe, une caisse régionale en l’occurrence, et c’est sur la base de ce pilote que nous démarrerons le déploiement lors des années 2011 et 2012.
EBM: Vos résultats sont impactés par les événements climatiques. Quelles conséquences en tirez-vous ?
CC: Je crois que cette question est importante et elle appelle de ma part trois observations. La première c’est que, oui, le coût de Xynthia est élevé. Nous avons, je l’ai dit tout à l’heure, réglé 200 millions d’euros à nos assurés et sociétaires. Le coût net de 75 millions d’euros est malgré tout absorbable, nous le démontrons d’ailleurs avec un résultat positif de 127 millions d’euros.
Le deuxième point que je voudrais dire c’est que nous avons fortement renforcé nos protections en réassurance contre le risque tempête, à la fois en termes de plafond, puisque maintenant notre plafond nous permet de supporter une tempête ayant une probabilité de survenance de l’ordre d’une fois tous les 200 ans, et également en termes de rétention.
Et puis, enfin, troisième point extrêmement important, c’est que nous sommes puissants et très présents sur le marché français en assurance de biens et de responsabilité et notamment dans le monde rural. Et nous ne voulons pas nous désengager de ce point de force. Au contraire, nous voulons capitaliser sur ce point de force. Et, par conséquent, pour diluer l’impact d’événements naturels en France, notre stratégie est claire, c’est une stratégie de diversification : diversification en direction des assurances de personnes et diversification géographique. Regardez, il y a dix ans, le groupe était un groupe franco-français, aujourd’hui nous sommes présents dans 13 pays et nous exerçons une activité internationale pour 30 % du total de notre chiffre d’affaires. Et puis, il y a dix ans, notre groupe était d’abord un groupe d’assurance non-vie, aujourd’hui, c’est un groupe qui fait plus de 52 % de son chiffre d’affaires dans le domaine des assurances de la personne.
EBM: Quelles sont les perspectives pour la fin de l’année 2010 ? Êtes-vous toujours en ligne avec votre plan stratégique triennal 2010 – 2012 ?
CC: Sur ce plan, je crois que ce que l’on peut dire c’est que notre croissance, notre développement devraient rester soutenus parce que nous capitalisons sur l’ensemble des investissements que nous avons réalisés dans le marketing, dans la distribution, dans la publicité et que nous continuons de faire. Je crois qu’au plan des résultats, évidemment, le résultat de l’année sera impacté par la tempête Xynthia, mais il sera dilué sur l’ensemble de l’année et je crois que pour revenir sur le plan stratégique et opérationnel, à l’horizon 2012, je dois rappeler, d’une part, que nous sommes en tout début de période de plan 2010 – 2012 et qu’il n’y a aucune raison, au vu de nos résultats, de modifier nos objectifs à l’horizon 2012. Je pense pouvoir dire que nous gardons le cap et à cet égard, je suis particulièrement serein sur l’atteinte de nos objectifs.
EBM: Christian Collin, Directeur Général Finance et Risques de Groupama, je vous remercie.
CC: Merci.