EuroBusiness Media (EBM) : Eurotunnel a récemment publié ses résultats pour le premier semestre 2007. Je dis Eurotunnel, mais en réalité cette société-là n'existe plus en tant quelle puisqu'elle a fait l'objet en juin d'une prise de contrôle par Groupe Eurotunnel SA, dans le cadre du refinancement. Jacques Gounon, bonjour. Vous êtes le PDG du Groupe Eurotunnel SA, quels sont vos commentaires sur les performances du Groupe au premier semestre ?
Jacques Gounon (JG) : Alors les résultats opérationnels sont excellents. Les choses vont bien, le trafic est là, on a une forte croissance de nos marchés, une forte croissance de notre activité. Les résultats sont aussi en forte croissance, on y reviendra. Donc l'avenir du Groupe Eurotunnel est tout à fait satisfaisant.
EBM : Alors on voit donc que les paramètres d'exploitation ont considérablement progressé ce dernier semestre. Est-ce que la tendance va continuer à ce rythme ?
JG : Alors déjà rappelons quelles sont ces performances. La marge opérationnelle, ce qui est vraiment la richesse de l'entreprise, dépasse les 200 millions d'euros pour ce premier semestre est en hausse de 15%. Elle était déjà en hausse l'année dernière. Le résultat net, lui, est en hausse de plus 52%, donc on a vraiment des choses extrement positives. Il est certain que, avec les perspectives excellentes du second semestre, en particulier la coupe du monde de rugby, la mise en service de la ligne à grande vitesse en Grande-Bretagne, on peut compter sur un 2008 satisfaisant.
EBM : Apres la restructuration fiancière que vous avez engagée, est-ce que l'on peut désormais considérer que le Groupe Eurotunnel est maintenant en ordre de marche et que les difficultés financières appartiennent entièrement au passé ?
JG : La réponse est oui, on a divisé la dette par deux. Eurotunnel a réussi à survivre 10 ans avec une dette absolument gigantesque, abyssale : 9 milliards d'euros. On est maintenant à 4,2 milliards d'euros, on a des résultats qui sont bien meilleurs que dans le passé, qui sont historiques compte tenu des opérations de redressement que nous avons engagées. Donc honnêtement, il n'y a aucun problème quant à la visibilité et la solidité pour l'avenir.
EBM : Quand pourra-t-on voir le nouveau Groupe afficher un résultat positif et distribuer des dividendes ?
JG : Alors 2007 est une année de transition, donc on verra bien au deuxième semestre si les surperformances compensent le résultat net négatif des anciennes Eurotunnel, puisque c'est malheuresement négatif au titre de l'ancien Eurotunnel. 2008 sera vraiment l'année de référence. Et quant aux dividendes, c'est un objectif majeur du plan de sauvegarde, et il est écrit dans le plan de sauvegarde que l'objectif, en matière de dividende, c'est 2011.
EBM : Comment évolue le trafic transmanche et aussi vos revenus issus des navettes de voitures et camions ? On sait par ailleurs que vous êtes préoccupés par la situation actuelle dans le fret ferroviaire.
JG : Oui, alors on a des positions contrastées. Nos navettes, qui transportent des passagers dans leurs voitures ou des camions, ont connues une progression de 8%, qui est là encore une progression tout à fait inégalée et pratiquement inconnue dans le passé. En ce qui concerne Eurostar, j'ai évoqué la mise en service de la nouvelle ligne. Certes c'est pour l'année prochaine, mais dès cette année Eurostar enregistre de très intéressantes performances. Et pour eux, comme pour nous, je crois que ce qui est important, c'est que les compagnies aériennes et les aéroports connaissent les difficultés - en particulier d'enregistrement- que l'on connaît. Donc l'avenir du chiffre d'affaires est très positif. Pour le fret, qui est entre les mains de fret SNCF et de WS, la situation n'est clairement pas satisfaisante : les frais fixes sont trop lourds, et il faudra indiscutablement - comme cela a été fait du coté britannique - qu'on trouve ne France une solution pour alléger les charges du fret si on veut le voir repartir. Je crois que c'est une mission de développement durable qui doit certainement s'inscrire dans les perspectives gouvernementales actuelles.
EBM : Il est vrai que Groupe Eurotunnel appartient à cde que l'on appelle la catégorie des « penny stocks », puisqu'il cote environ 30 centimes par action.Vous avez décidé de faire sortir l'action de cette catégorie en procédant prochainement à un regroupement des actions du Groupe Eurotunnel. Quand et comment devrait se dérouler cette opération ?
JG : Alors quand ? Le plus tôt possible ; dans un mois, un moi et demie. En tout état de cause avant la fin de l'année. Un regroupement d'un ratio raisonnable de 1 à 40, qui va permettre de placer Eurotunnel à sa vraie valeur, parmi les sociétés avec lesquelles elle peut être comparée. J'allais dire c'est enfin l'arrivée de Groupe Eurotunnel, qui tourne le dos au passé combien difficile d'Eurotunnel : c'est l'arrivée de Groupe Eurotunnel dans la catégorie des grands, des vrais, des solides, de ceux qui portent un avenir.
EBM : Vous projetez également de lancer une augmentation de capital pour racheter une partie des obligations convertibles, ce que l'on appelle des ORAs. Quand et comment envisagez vous cette opération ?
JG : Alors cette opération importante, qui va permettre de boucler le dispositif de sauvegarde, doit se faire sur des comptes lisibles - aussi bien pour les futurs investisseurs que pour les actionnaires actuels à qui l'on va proposer de souscrire. Donc les comptes lisibles existeront fin décembre 2007, puis que Groupe Eurotunnel SA n'existe que depuis début juillet. Et par conséquent, c'est une opération à préparer pour le printemps prochain.
EBM : Enfin, pour des investisseurs qui souhaiteraient accompagner votre Groupe sur le long terme, quels seraient vos principaux messages-clés concernant le nouveau Groupe Eurotunnel ?
JG : Alors, il y a des mots clés : c'est une infrastructure, c'est une concession, c'est une concession de très long terme - elle va jusqu'en 2086, c'est une concession rentable, profitable - elle dégage des résultats qui ne cessent de s'améliorer, c'est une concession qui a maintenant une structure financière extrement solide - avec une dette qui a été divisée par deux. Je serais tenté de dire : on a presque plus que trois bonnes raisons, on en a 5 ou 6, pour dire : oui, c'est un investissement porteur, sûr, fiable.
EBM : Jacques Gounon, PDG de Groupe Eurotunnel SA, je vous remercie.
JG : Merci.