EuroBusiness Media (EBM) : Le Groupe BNP Paribas publie ses résultats du troisième trimestre 2013. Jean-Laurent Bonnafé, bonjour et bienvenue. Vous êtes l'Administrateur Directeur Général de BNP Paribas, quels sont vos commentaires sur les résultats du Groupe au troisième trimestre ?
Jean-Laurent Bonnafé : Au troisième trimestre, BNP Paribas réalise un résultat net part du Groupe de 1,4 milliard d’euros, en hausse de 2,4%, malgré un environnement encore difficile en Europe. Dans les pôles opérationnels, les revenus démontrent leur résilience, mais sont marqués par la faible activité de clientèle, ce trimestre, sur les marchés de taux d’intérêt. Les frais de gestion restent bien maîtrisés, grâce aux économies que notre plan « Simple & Efficient » continue de dégager.
Le coût du risque du Groupe recule par rapport aux trimestres précédents confirmant, à 55 points de base, notre bonne gestion des risques. Tous les réseaux Retail continuent d’afficher une forte croissance des dépôts, en particulier pour Domestic Markets avec une progression de 4.5%. BNP Paribas confirme également ce trimestre le niveau très important de sa solvabilité et de sa liquidité. Ainsi, le ratio Common Equity Tier 1 du Groupe en norme Bâle 3 « fully loaded » augmente à 10,8%, niveau très élevé. De même, la réserve de liquidité immédiatement disponible progresse encore, pour atteindre le montant considérable de 239 milliards d’euros fin septembre. Pour conclure, BNP Paribas confirme au T3 ses excellents résultats et continue de créer de la valeur pour ses actionnaires.Notre actif net comptable par action progresse à presque 63 euros, tandis que l’actif net tangible par action augmente à 52,4 euros.
EBM : Concernant votre plan « Simple & Efficient », pourriez-vous nous faire un point sur son avancement ?
Jean-Laurent Bonnafé : La mise en œuvre de notre plan d’économies se poursuit rapidement. A fin septembre, nous avions déjà réalisé des économies récurrentes totalisant 549 millions d’euros. Cela signifie que nous avons atteint, et même dépassé, notre objectif pour 2013 de 500 millions d’euros. En parallèle, nous avons continué à enregistrer des coûts de transformation à hauteur de 374 millions d’euros pour les 9 premiers mois de 2013. Au T3 nous avons continué à lancer de nouveaux projets. Fin septembre, nous étions pratiquement à 1 900 projets lancés, soit environ 88% du nombre total de projets identifiés pour le programme Simple & Efficient. Pour résumer, je suis très satisfait de la mise en œuvre de notre plan Simple & Efficient qui est sur de très bon rails.
EBM : Concernant le coût du risque, pourriez-vous commenter son évolution dans les différents métiers et zones géographiques au troisième trimestre ?
Jean-Laurent Bonnafé : Comme je l’indiquais, au troisième trimestre, le coût du risque du Groupe enregistre une baisse en valeur absolue, aussi bien par rapport au trimestre précédent que par rapport à l’année précédente. Si l’on regarde plus en détail ses différentes composantes, le coût du risque est faible chez CIB Corporate Banking, sans impact particulier d’un dossier spécifique ce trimestre. Chez Domestic Markets, malgré le contexte économique, le coût du risque reste faible en France et en Belgique ; alors qu’en Italie, il se stabilise chez BNL par rapport aux trimestres précédents de 2013. Europe-Méditerranée affiche un coût du risque quasiment stable. Aux États-Unis, chez BancWest le coût du risque du trimestre est nul, dans la mesure où les provisions, déjà faibles, sont compensées par des reprises. Enfin, Personal Finance affiche un coût du risque légèrement inférieur pour le trimestre, grâce à une amélioration en France et en l’Allemagne.
EBM : L’« Asset Quality review » pourrait être un challenge pour certaines banques. Êtes-vous confiant que BNP Paribas réussisse les tests de la BCE ?
Jean-Laurent Bonnafé : La BCE a annoncé la méthodologie la semaine dernière qu’elle entend appliquer pour son « évaluation détaillée » des banques de la zone euro, qui comprendra notamment une revue de la qualité des actifs et un test de résistance. Nous constatons que l’approche adoptée par la BCE semble extrêmement approfondie et détaillée, tout comme notre approche interne, et nous nous en réjouissons. Compte tenu de notre gestion des risques rigoureuse, démontrée tout au long des crises récentes, et même si des ajustements mineurs pouvaient être requis ici ou là, j’ai la conviction que nous serons bien au delà des seuils requis. Plus généralement, cette revue est la première étape de la mise en place d’une Supervision Unique dans la zone euro. Elle s’inscrit dans un processus global qui mène vers un marché bancaire européen unifié, évolution très positive, et elle renforcera la confiance dans le système financier européen.
EBM : Comment jugez-vous la performance de Domestic Markets au cours du trimestre ?
Jean-Laurent Bonnafé : Au troisième trimestre, Domestic Markets continue d’enregistrer une forte croissance des dépôts, avec en parallèle une réduction modérée de ses crédits. Les dépôts atteignent 292 milliards d’euros, en progression de 13 milliards, soit une croissance annuelle de 4,5%, tirée par une bonne progression de tous nos réseaux et de Cortal Consors en Allemagne. Par ailleurs, le ralentissement de la demande de crédit se poursuit. Notre nouvelle banque mobile « Hello bank! » séduit de nouveaux clients en Allemagne, en Belgique et en France. Comme prévu, elle vient cette semaine de commencer également à fonctionner en Italie. Dans une conjoncture peu porteuse, Domestic Markets réalise un produit net bancaire proche de 4 milliards d’euros. Grace à la poursuite de la reprise des commissions financières et à la bonne contribution d’Arval, qui compense la baisse des encours de crédit. L’accent mis en permanence sur le contrôle des frais de gestion a permis une réduction des coûts. Ceux-ci enregistrent un recul de 1,2% hors coût de lancement de Hello Bank!, permettant une amélioration du coefficient d’exploitation dans tous les réseaux. Le résultat brut d’exploitation s’améliore de plus de 4% (hors coûts de Hello bank !), et le résultat avant impôt dépasse 900 millions d’euros ce trimestre. En conclusion, on peut dire que Domestic Markets montre une performance très solide en lien avec l’amélioration de son efficacité opérationnelle.
EBM : Si l’on regarde maintenant l’activité Retail banking dans la zone Europe-Méditerranée, quelle sont les grandes tendances du trimestre ?
Jean-Laurent Bonnafé : Notre division Europe-Méditerranée continue à montrer un bon dynamisme commercial, avec une croissance soutenue des volumes, particulièrement en Turquie. Les dépôts augmentent de presque 11% et les crédits de 9%. Le trimestre a été marqué par de fortes variations de change, en particulier de la Livre turque. Ainsi pour mieux saisir les évolutions sous-jacentes, j’évoquerai les variations du compte de résultat à périmètre et change constants. Le PNB progresse de 2,4% malgré l’effet de nouvelles réglementations en Turquie et en Algérie. Les coûts progressent essentiellement à cause de la poursuite des investissements dans le dispositif commercial, particulièrement en Turquie. Cette augmentation est cependant compensée partiellement par les mesures prises pour améliorer l’efficacité opérationnelle. Dans l’ensemble, grâce à un coût du risque globalement stable et une contribution accrue de la Banque de Nankin, Europe-Med clôture ce trimestre avec un bénéfice avant impôt à peine inférieur à celui du 3ème trimestre de l’an dernier. Mais sur 9 mois, le bénéfice avant impôt progresse de presque 60%, dépassant 400 millions d’euros.
EBM : En matière de crédit à la consommation, votre stratégie passe par le développement de coentreprises, en Russie, en Allemagne ou en Chine, par exemple. Cette stratégie s’est-elle avérée gagnante ? Quelle est la performance de Personal Finance dans la conjoncture actuelle ?
Jean-Laurent Bonnafé : Dans le cadre de sa stratégie de développement, Personal Finance a créé plusieurs coentreprises et conclu plusieurs partenariats commerciaux avec des acteurs majeurs du monde économique. Ainsi, en Allemagne, nous avons avec Commerzbank une coentreprise très performante, qui nous place au troisième rang dans le domaine du crédit à la consommation sur le lieu de vente. En Russie, nous avons accru notre présence sur ce segment de marché en nous associant avec Sberbank. Plus récemment, nous avons conclu un partenariat avec la Banque de Nankin pour développer le crédit à la consommation en Chine. Et notre partenariat avec la chaine de supermarchés Cora en France est désormais opérationnel. Aujourd’hui, Personal Finance, présent dans plus de 20 pays répartis sur 4 continents, continue de diversifier ses sources de revenus dans le crédit à la consommation. Ce développement dynamique est également visible dans les résultats du T3. La légère baisse du PNB s’explique, en fait, essentiellement par la réduction des encours de prêts hypothécaires prévue dans le plan d’adaptation. Le crédit à la consommation connait en revanche une bonne évolution d’un climat favorable, particulièrement en Allemagne et en Belgique, mais continue de subir l’impact des réglementations en France. Les coûts ont sensiblement baissé grâce au plan d’adaptation et le coefficient d’exploitation s’améliore encore à 44%, un niveau très compétitif. Avec la légère amélioration du coût du risque que j’ai déjà eu l’occasion de le mentionner, Personal Finance clôture ainsi le trimestre sur un bénéfice avant impôt de 320 millions d’euros, confirmant la forte rentabilité de ce métier.
EBM : Comme pour un bon nombre de vos concurrents, les revenus de CIB ont souffert d’un recul de l’activité Fixed Income au T3. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre activité Marchés de capitaux ? Toujours chez CIB, quelle a été la performance de Corporate Banking ?
Jean-Laurent Bonnafé : Au 3e trimestre, les revenus de CIB dépassent les 2 milliards d’euros, soit une baisse de 10,7% par rapport à l’an dernier, sur une base comparable. Comme vous l’indiquiez, les revenus ont souffert de la faiblesse de l’activité de la clientèle sur les marchés des taux. Le PNB de Marchés de Capitaux a été effectivement impacté par l’attentisme des investisseurs lié aux incertitudes de marchés, telles celle concernant la sortie progressive par la Fed de sa politique. Et notre VaR a été à un très bas niveau ce trimestre. S’agissant de Fixed Income, il faut avoir en tête que le 3e trimestre 2012 avait bénéficié de l’annonce du dispositif OMT par Mario Draghi. Ceci dit, au T3, l’activité de la clientèle sur les marchés de taux d’intérêt a été réduite, alors que l’activité Crédit évoluait favorablement. A fin septembre, nous avons renforcé nos positions de leadership en émissions obligataires. Nous devenons 2ème au classement « All Bonds in Euro » et nous confirmons notre 8ème place au classement « All International Bonds ». Actions et Conseil connait une évolution favorable avec une progression des volumes de la clientèle sur les marchés de dérivés actions. C’est particulièrement vrai pour l’Europe. On constate également un regain d’intérêt de la clientèle pour les produits structurés. Nous avons eu une bonne performance en « equity-linked », avec une position de numéro 3 pour les émissions en Europe. Les revenus de Corporate Banking continuent d’être affectés par la baisse des encours résultant du plan d’adaptation de 2012. Cependant, conformément à notre plan de développement en Asie, la croissance de nos revenus s’est poursuivie dans cette région. Dans le domaine des crédits syndiqués, nous confirmons notre première place en Europe, avec des positions de leader dans tous les principaux segments. Concernant les ressources, les dépôts atteignent environ 59 milliards d’euros, en progression de 10% par rapport à l’année précédente, grâce au développement de la collecte de dépôts et de notre offre de cash management. En cash management, nous avons continué à gagner des mandats significatifs et nous avons progressé au 4e rang mondial pour les entreprises à fin septembre. Pour l’activité de crédit, les encours se stabilisent, tandis que Corporate Banking continue de développer l’approche « Originate to Distribute ». En bref, nous poursuivons la mise en place de notre nouveau « business model ».
EBM : Votre division Investment Solutions a poursuivi sa croissance au cours du trimestre. Quels sont les domaines qui sous-tendent cette performance ?
Jean-Laurent Bonnafé : Investment Solutions a eu un bon trimestre. Les actifs sous gestion progressent légèrement à 874 milliards malgré une décollecte nette essentiellement liée aux fonds obligataires dans l’Asset Management. En revanche, Wealth Management et l’Assurance enregistrent une collecte nette positive, particulièrement en Asie et dans les réseaux domestiques. Au T3, nous poursuivons notre développement mondial, comme le montrent le nouveau partenariat de bancassurance conclu par Cardif avec Saigon Commercial Bank au Vietnam. Cette évolution se traduit par une progression de 5% de nos revenus à périmètre constant, avec une contribution positive des trois métiers. La croissance des revenus de l’Assurance a été tirée par l’activité d’épargne au T3. Gestion Institutionnelle et Privée enregistrent globalement une bonne performance, et les revenus du métier Titres progressent du fait de l’augmentation des volumes de transactions et du montant des actifs en conservation. Les frais de gestion augmentent plus lentement que les revenus. En Assurance, les coûts progressent du fait de l’augmentation du niveau d’activité tandis que chez Gestion Institutionnelle et Privée, c’est plutôt le fait d’investissements sélectifs liés au plan de développement dans la gestion d’actifs. Le métier Titres confirme sa bonne maîtrise des coûts, avec une augmentation marginale par rapport à l’année précédente. Globalement, à périmètre constant, le résultat brut d’exploitation progresse de plus de 11% et le bénéfice trimestriel avant impôt atteint plus de 500 millions d’euros. Je dirais donc que tous les différents métiers ont contribué à la bonne performance d’Investment Solutions au T3.
EBM : En conclusion, pouvez-vous nous donner un éclairage sur la préparation de votre nouveau plan de développement ?
Jean-Laurent Bonnafé : La préparation de notre nouveau plan de développement est en bonne voie et sera bientôt achevée. À ce jour, nous avons annoncé quelques plans dans les domaines et les métiers où il était important d’avancer rapidement, et où les règles du jeu étaient suffisamment clarifiées. La prochaine étape sera la présentation générale du plan. Nous allons ainsi présenter les principaux objectifs du Groupe lors de nos résultats annuel en février et nous poursuivrons avec un Investor Day à Paris vers la fin mars, où nous pourrons détailler le plan plus largement. Rendez-vous début 2013 donc !
EBM : Jean-Laurent Bonnafé, Administrateur Directeur Général de BNP Paribas, merci beaucoup.
Jean-Laurent Bonnafé : Merci à vous.