EuroBusiness Media (EBM) : Sanofi, leader mondial et diversifié de la santé, publie aujourd’hui ses résultats du premier trimestre 2013. Jérôme Contamine, bonjour. Vous êtes le Directeur financier de Sanofi. Comment voyez-vous la performance du Groupe au premier trimestre 2013 ?
Jérôme Contamine : Ce premier trimestre constitue pour le groupe une importante charnière. C’est le dernier trimestre où nous aurons ressenti un impact significatif de la falaise brevetaire. Le chiffre d'affaires et le bénéfice du trimestre ont souffert de la perte d’exclusivité sur nos molécules Plavix®, Avapro® et Eloxatine®. Pendant ce temps, nos plateformes de croissance poursuivent leur excellente progression. Les divisions Diabète, Vaccins et Genzyme enregistrent une croissance à deux chiffres. Nous avons su bien maîtriser nos frais opérationnels, même si l’expiration du brevet Plavix® et Avapro® se traduit par une baisse de 42 pour cent de notre BNPA. Celui-ci recule donc à 1,22 euro par action au premier trimestre.
EBM : Maintenez-vous vos prévisions pour l’exercice, toujours dans l’hypothèse qu’une forte reprise de la croissance au deuxième semestre vous aidera à réaliser votre objectif annuel ?
Jérôme Contamine : La performance de ce premier trimestre est conforme à la guidance pour l’année en cours que nous avons donnée le 7 février dernier. D’une part, l’incidence résiduelle de l’expiration du brevet Plavix® sur l’année avoisinera les 800 millions d’euros, dont 562 millions rien qu’au titre du premier trimestre. Compte tenu de cet élément, et vu la forte progression de nos plateformes de croissance, nos investissements dans de nouveaux domaines de croissance, les investissements et frais engagés pour le lancement de nouveaux produits, le contrôle rigoureux de nos coûts et de nos investissements, je suis en mesure de renouveler nos perspectives pour l’exercice, à savoir un BNPA entre stable ou en recul de 5 % à change constant par rapport à celui de 2012, sauf événements inattendus.
EBM : Vous avez rencontré récemment quelques difficultés pour les médicaments en vente libre en Chine et les génériques en Amérique latine. Êtes-vous confiant pour vos perspectives de croissance dans les marchés émergents ?
Jérôme Contamine : De manière générale, les marchés émergents restent un des grands atouts de Sanofi. Au cours du trimestre, avec 2,7 milliards d’euros, ils représentent plus du tiers de notre chiffre d'affaires et ont montré une croissance de 6,5 %. En Asie, en Afrique et au Moyen-Orient, notre croissance s’inscrit à deux chiffres ; elle se situe autour de 5% en Amérique latine. L’Europe de l’Est souffre du ralentissement économique général observé partout dans l’Union européenne. La croissance dans cette zone est donc nulle si l’on inclut la Russie, et négative pour les pays d’Europe de l’Est au sens strict. Nous sommes parfaitement convaincus que nous restons idéalement placés pour tirer profit de toutes les opportunités de croissance dans ces marchés émergents.
EBM : Votre division Diabète pourrait bien tirer profit de la mauvaise presse qu’ont eue récemment certains de vos concurrents. Comment voyez-vous les perspectives pour la division Diabète ?
Jérôme Contamine : Tout d’abord, la division Diabète vient d’enregistrer une forte croissance au 1er trimestre, avec un chiffre d'affaires légèrement supérieur à 1,5 milliard d’euros, en hausse de 19,6 %. Le fer de lance de cette performance aura été Lantus®, qui confirme une fois de plus son statut d’insuline de référence avec une croissance de 21 %, et même de 26 % aux États-Unis. Aux États-Unis, les ventes de SoloSTAR représentent 57 % du chiffre d'affaires de Lantus®. Les résultats de l’étude ORIGIN ont été transmis aux autorités en Europe et aux États-Unis. Nous avons aussi enregistré un fort rebond des ventes d’Apidra® (+30 %) sur le trimestre ainsi qu’une forte amélioration dans l’évolution de notre portefeuille R&D en Diabète. En premier lieu, la Commission européenne a donné en février son accord pour la commercialisation de Lyxumia®, un agoniste des récepteurs du GLP-1 en une prise par jour. Le lancement et la commercialisation de Lyxumia® ont commencé en Allemagne, puis au Royaume-Uni à la fin du premier trimestre, et se poursuivront tout au long de l’année 2013. Le programme de Phase III EDITION destiné à évaluer la nouvelle formulation d’insuline glargine est en bonne voie. Les résultats de l’étude EDITION I seront communiqués au prochain congrès de l’ADA (American Diabetes Association) en juin. Les grandes lignes de l’étude EDITION II y seront également présentées. Pour les dispositifs de combinaison Lantus® / Lyxumia®, suite aux revers qu’a connus un concurrent, comme vous l’avez dit, mais également aux retards et à la complexité du développement du dispositif Fix-Flex, nous avons décidé de donner la priorité au dispositif à proportion fixe. Là aussi, nous communiquerons des informations plus précises sur le calendrier de développement lors du congrès de l’ADA. Enfin, nous disposons maintenant de deux produits biosimilaires entrés en phase I à la fin de l’année dernière ou au début de cette année, dans le but d’élargir l’offre de traitement du diabète. Comme vous le voyez, nous avons été très actifs dans ce domaine. Nous sommes donc relativement confiants de pouvoir soutenir à long terme la croissance de cette activité essentielle pour Sanofi.
EBM : La performance du portefeuille de produits contre les maladies rares de Genzym a-t-elle répondu à votre attente au cours de ce trimestre ?
Jérôme Contamine : Sans aucun doute ! Genzyme vient de clôturer un nouveau trimestre de forte croissance. Dans l’ensemble, les ventes ont atteint 473 millions d’euros, rien que pour les produits destinés aux maladies rares (+20 % par rapport à l’an dernier). Cerezyme® progresse de 16 % ; plus important encore, Fabrazyme® double largement ses ventes par rapport au premier trimestre de l’an dernier. Je rappelle qu’au premier trimestre de l’an dernier, nous étions sur le point de lancer la production à notre nouveau site de Framingham. Depuis lors, notre situation de production s’est considérablement améliorée. Nous avons réussi à constituer les stocks, à regagner des parts de marché, et à fournir de nouveaux patients. Pour toutes ces raisons, nous sommes convaincus des bonnes perspectives de notre division Maladies Rares.
EBM : Le lancement aux États-Unis d’Aubagio®, au 1er trimestre, s’est déroulé de manière très encourageante. Comment voyez-vous évoluer l’activité Sclérose en Plaques de Genzyme à l’avenir ?
Jérôme Contamine : Vous avez raison : le deuxième point de grande satisfaction, chez Genzyme, est le déploiement de notre nouvelle activité Sclérose en Plaques. Ainsi, Aubagio® a été lancé aux États-Unis au 4e trimestre de l’an dernier, pour les patients souffrant de sclérose multiple. C’est un traitement oral en une prise par jour. Les ventes ont atteint 20 millions d’euros au premier trimestre 2013, et les prescriptions sont globalement conformes à l’évolution de Gilenya® sur le premier trimestre de lancement. Dans le même temps, le Comité des médicaments à usage humain (CHMP) a émis un avis favorable en vue du traitement de patients adultes atteints de sclérose en plaques récurrente-rémittente. Genzyme commence à préparer le lancement de Lemtrada™. Comme vous le savez, Lemtrada™ a été soumis pour approbation tant en Europe qu’aux États-Unis. Le dépôt a été accepté par la FDA au cours du premier trimestre, et nous attendons l’avis du CHMP, en Europe, au cours du deuxième trimestre de l’année.
EBM : Y a-t-il quoi que ce soit d’important à signaler, en cette fin de premier trimestre, à propos de votre portefeuille d’annonces ? Y a-t-il des résultats importants d’essais en Phase III ou des décisions des autorités réglementaires attendues d’ici la fin 2013 ?
Jérôme Contamine : Il est important de comprendre que pour Sanofi, groupe pharmaceutique, l’innovation est - et restera - le cœur de son avenir et de sa stratégie. Nous sommes ravis de voir émerger progressivement un portefeuille plus solide. Rien qu’au cours de ce trimestre, nous avons obtenu un avis favorable du CHMP pour Aubagio®, que j’ai déjà cité, et l’homologation de la Commission européenne pour Lyxumia®, Zaltrap® ainsi que pour notre vaccin pédiatrique hexavalent Hexyon™. Au cours des prochains trimestres, nous attendons également plusieurs rapports relatifs à des études en Phase III, y compris notre nouvelle formulation d’insuline glargine, otamixaban, iniparib et notre inhibiteur de JAK2. Comme vous le voyez, notre division R&D a été particulièrement active ce trimestre. Aujourd’hui, notre portefeuille de R&D compte 62 projets en phase de développement clinique, dont 16 sont en Phase III ou ont fait l'objet de demandes de mise sur le marché.
EBM : Lorsque vous avez commencé à rembourser l’endettement lié à l'acquisition de Genzyme, vous avez laissé entendre qu’un endettement net d’environ 10 milliards d’euros vous paraissait raisonnable. Aujourd’hui, vous êtes déjà en deçà de ce seuil. Quelles en seront les implications pour votre politique d’allocation de capitaux ? Devons-nous nous attendre à d’autres acquisitions, à un renforcement de votre programme de rachat d’actions, ou à un dividende plus élevé ?
Jérôme Contamine : En effet, nous avons légèrement réduit notre endettement depuis la fin 2012 (environ 300 millions d’euros) à 7,4 milliards d’euros. Bien entendu, investir dans nos activités reste notre priorité. Nous ne pouvons que confirmer que notre stratégie première consiste à poursuivre notre politique d’acquisitions ciblées complémentaires. Nous avons fait la preuve que nous sommes à même de mener à bien et d’intégrer parfaitement de telles acquisitions. Rien qu’au premier trimestre, nous avons réalisé pour 345 millions d’euros d’investissements dans de nouvelles acquisitions, y compris Genfar en Colombie. Nous augmentons régulièrement notre dividende. Le dividende qui sera payé dans les prochains jours s’élève à 2,77 euros par action, contre 2,65 euros l'an dernier, offrant maintenant un taux de distribution de 45 %. Nous entendons porter ce ratio à 50 % pour le dividende qui sera payé en 2014 sur le résultat 2013. Nous maintenons également notre politique de rachat opportuniste d’actions, d’abord pour compenser la dilution que génère la création d’actions nouvelles liées à l’exercice des stock options. Rien qu’au cours de ce trimestre, nous avons racheté des actions pour un montant total de 400 millions d’euros. Enfin, je tiens à dire que notre bilan reste particulièrement solide, ce qui nous donne les moyens de saisir les opportunités qui correspondent à notre stratégie que je viens d’évoquer.
EBM : Jérôme Contamine, CFO de Sanofi, merci beaucoup.
Jérôme Contamine : Merci à vous !