EuroBusiness Média (EBM) : Société Générale, l'un des plus grands groupes européens de services financiers, publie ses résultats pour 2016. Frédéric Oudéa, bonjour. Vous êtes le Directeur général de Société Générale. Comment s'est comporté le groupe Société Générale en 2016 ?
Frédéric Oudéa : Je crois que nous avons eu de très bonnes performances commerciales et financières, dans un environnement incertain, parfois turbulent. Nous avons bénéficié de l'équilibre de notre modèle avec, notamment, de très belles performances de nos activités de banque de détail hors de France et de services financiers à l'international, une résilience des activités de banque de détail en France et, également, de services aux grandes entreprises et aux investisseurs. Et puis, d'une manière, là aussi générale, pour tous les métiers, nous avons bénéficié de la bonne maîtrise de nos coûts et de nos risques. Au total, on a donc un résultat net solide, en progression, qui nous permet aussi bien sûr d'augmenter les dividendes à nos actionnaires. Grande satisfaction également de 2016, nous avons des ratios de capital et de liquidité au-delà des exigences réglementaires. Notamment, nous avons encore renforcé notre ratio de capital dur, le Core Tier One, à 11,5 %. Donc, au total, une année satisfaisante, une nouvelle foisdans un environnement qui n'était pas si simple.
EBM : Alors, cet exercice marque aussi le terme de votre plan stratégique 2014-2016. Quel bilan en tirez-vous ?
Frédéric Oudéa : Je crois que nous avons, dans un environnement économique très différent de celui que nous avions imaginé et un environnement réglementaire beaucoup plus contraignant, répondu à nos objectifs stratégiques, commerciaux et financiers. Globalement, la banque, aujourd'hui, est plus centrée sur les clients, elle a ajouté de la valeur ajoutée et puis elle a simplifié son modèle. Nous sommes donc aujourd'hui plus compacts, plus simples, plus performants, au total, qu'il y a 3 ans. Deuxièmement, nous avions l'ambition d'être, d'un point de vue opérationnel, excellents en matière de gestion des coûts, excellents en matière de gestion des risques et là, nous avons fait même mieux que ce que nous avions en cible.
Enfin, nous avions bien, en 2013, l'ambition de répondre à tous les défis réglementaires de l'époque et, donc, le renforcement du bilan, de la liquidité, là aussi sont au rendez-vous : nous dépassons les objectifs que nous nous étions fixés.
Enfin, au total, en rentabilité, nous avons amélioré structurellement la rentabilité de nos métiers. Donc, ça nous donne des fondations extrêmement solides pour envisager la nouvelle étape, le nouveau chapitre qui s'ouvrira à partir de cette année.
EBM : Et comment s'est déroulée 2016 pour votre banque de détail en France ?
Frédéric Oudéa : Alors, notre banque de détail en France, c'est notre présence en banque de détail en Zone Euro. 2016 est une bonne année. D'abord, c'est une bonne année d'un point de vue commercial. Nos trois réseaux, Société Générale, Crédit du Nord, Boursorama, conquièrent des clients. Nous avons conquis 400 000 clients particuliers nouveaux en 2016. Les trois réseaux ont des parts de marché, des conquêtes de clients. Et puis nous sommes entrés en relation avec 4 000 entreprises nouvellement clientes de Société Générale. Donc, des métiers dynamiques.
Deuxièmement, bien entendu, nous avons eu une érosion de nos revenus liée à la situation de tauxd'intérêts négatifs à court terme, une courbe de taux d'intérêts plate. En dépit de cette érosion des revenus, par une bonne gestion des coûts, avec la capacité d'investir dans l'innovation et de faire des économies, et aussi une baisse significative du coût du risque, in fine, la contribution nette de ce métier augmente de 3 % en 2016. Donc, non seulement le commercial était solide mais financièrement aussi, nous avons une contribution en hausse. Et en fait, une contribution record de ces métiers au Groupe.
EBM : Et concernant la Banque de détail et les Services financiers internationaux, le potentiel de croissance se confirme-t-il ?
Frédéric Oudéa : Totalement. Et on l'avait dit : on a là un potentiel de croissance fort et de rentabilité fort. Concrètement, le revenu augmente de 4 %. Et là, tous les métiers y contribuent. La croissance des crédits est forte, la croissance des dépôts. Commercialement nous sommes dans des géographies avec des économies plutôt dynamiques, avec des marchés bancaires qui ont encore du potentiel de développement et nous avons des positions de leader.
Ensuite, on a appliqué la même discipline sur la gestion des coûts et la gestion des risques où nous avons un coût du risque qui baisse par rapport à l'année dernière. Et ça, à travers toutes les géographies. Au total, nous avons donc un pôle qui se développe et qui a une belle rentabilité, supérieure à 15 %. Pour le futur, ce pôle va continuer à délivrer de la croissance. Nous sommes présents dans des géographies, comme je l'ai dit, qui vont continuer à bien se développer. Nous allons continuer à améliorer les performances de nos différentes banques de détail. Et puis en matière de services financiers, que ce soit aux entreprises ou aux particuliers, nous avons de très beaux projets en ce début d'année. En ce qui concerne l'assurance, nous annonçons la signature du rachat de la participation d'Aviva dans Antarius, la compagnie d'assurance de Crédit du Nord que nous allons fusionner avec Sogécap, avec beaucoup de synergies à la clé pour nos clients et en matière de coûts. Et puis, en ce qui concerne notre métier de gestion de flotte automobile ALD, nous annonçons l'intention de le mettre en bourse pour en faire un leader de la mobilité. Le monde de la voiture est en train de changer. Le rapport à la voiture des particuliers, des entreprises, des collectivités locales, change. Or, là, nous avons depuis plusieurs années construit un formidable métier qui gère des véhicules au service des collaborateurs des entreprises, dans des flottes d'automobiles d'entreprises. Ces savoir-faire, ces services, cette capacité de maintenance, nous pouvons l'appliquer à d'autres clients ou à d'autres usages de la voiture. Et par cette mise en bourse, nous voulons donner toute l'agilité, la flexibilité, qu'elles soient stratégiques, opérationnelles ou financières à ALD pour saisir pleinement ces opportunités.
EBM : Alors, 2016 a été une année chahutée sur les marchés. Cela a-t-il eu des conséquences sur vos activités de Banque de Grande clientèle et de Solutions investisseurs ?
Frédéric Oudéa : En 2016 à nouveau, nous confirmons à quel point le modèle s'est profondément transformé. En dépit des turbulences que vous citez, le BREXIT, l'élection américaine, les incertitudes politiques et réglementaires, le prix du pétrole, nous avons réussi à afficher une formidable résilience de nos revenus. Le modèle est équilibré, il est tourné vers les clients, vers des clients qui voient la valeur ajoutée et nous conquérons des parts de marché. Associé à une gestion des coûts très rigoureuse, une gestion des risques là aussi très disciplinée, ça nous permet de maintenir une belle rentabilité pour cette activité qui va continuer elle aussi à se développer. Nous voulons conquérir des parts de marché dans un monde où certains de nos concurrents sont encore en train de revoir leur stratégie. Nous considérons que nous avons encore mieux à faire en utilisant toute la palette d'expertises de très haut niveau, reconnues par des récompenses au niveau international, pour développer encore nos revenus, la confiance de nos clients et, bien sûr, derrière, la contribution de ce pôle à notre Groupe.
EBM : Et pour finir, comment est-ce que votre Groupe aborde 2017 et quelles sont vos perspectives à moyen terme ?
Frédéric Oudéa : Alors, d'abord sur le court terme, 2017, c'est une année qui, bien sûr, pourrait être marquée par de l'incertitude au niveau politique, que ce soit aux Etats-Unis ou en Europe. Mais l'économie sous-jacente n'est pas mauvaise en ce début d'année. Et nous avons plutôt confiance sur le fait que ces économies, que ce soit en pays développés ou en pays émergents, puissent continuer à croître. Dans un tel contexte, forts de ces très solides acquis sur tous nos métiers, nous entendons pleinement déployer notre potentiel de croissance, tirer profit de l'ensemble des initiatives destinées à nos clients qui à notre avis, vont avoir beaucoup d'impact.
Donc, au total, une année qui, avec une gestion des coûts et des risques qui va demeurer très rigoureuse, devrait être une nouvelle année de création de valeur pour nos actionnaires.
A moyen terme, nous voulons capitaliser notamment sur trois dimensions et continuer à mettre l'accent sur trois dimensions.
D'abord, l'impact client : continuer à être toujours plus tournés vers nos clients pour toujours plus de valeur ajoutée vers nos clients. Et nous sommes très confiants au regard des progrès réalisés, des niveaux de satisfaction de notre clientèle.
L'innovation, et notamment les ruptures liées aux technologies numériques, c'est un deuxième pan qui doit irriguer tout le Groupe. Tous les métiers, pas seulement la banque de détail en France - qui est peut-être évidemment celui qui est le plus impacté par ces nouvelles technologies - mais aussi d'autres géographies. En Afrique, il y a énormément d'innovation dans un modèle différent que nous voulons saisir. C'est aussi le cas des métiers de grandes entreprises. Bref, que ce soit vis-à-vis de nos clients ou vis-à-vis de nos collaborateurs, continuer à faire des pas de géant en matière d'innovation. Et que ce soit une culture partagée.
Et puis justement, le troisième point, c'est la culture, le déploiement de notre programme Culture et conduite. Nous avons le socle là aussi, les valeurs, le leadership modèle, des instruments de gestion des ressources humaines totalement cohérents, des formations qui sont totalement cohérentes avec ces valeurs auxquelles on croit. Ce programme Culture et conduite, c'est une énergie qui est consacrée à s'assurer que, quelles que soient les géographies, quels que soient les métiers, quelles que soient les fonctions, ces outils, ces instruments sont déployés d'une manière cohérente, et que quelque part, la marque de fabrique Société Générale est totalement apparente pour les clients et, bien sûr, pour les collaborateurs du Groupe.
Tous ces éléments forts, nous allons les inscrire dans un nouveau plan stratégique que nous préparons en 2017 et que nous présenterons d'ici la fin de l'année à nos actionnaires.
EBM : Frédéric Oudéa, vous êtes le Directeur général de Société Générale. Merci beaucoup.
Frédéric Oudéa : Merci.