EuroBusiness Media (EBM) : VINCI, leader mondial des concessions et de la construction, publie ses résultats pour le premier semestre 2012. Xavier Huillard, bonjour. Vous êtes le Président-directeur général de VINCI. Après une très bonne année 2011, pourriez-vous nous en dire plus sur les résultats de ce premier semestre 2012 ?
Xavier Huillard : Le premier semestre s’est bien déroulé. Malgré des conditions climatiques moins favorables, une baisse du trafic sur nos réseaux autoroutiers et un environnement économique plus difficile, malgré tout cela notre chiffre d’affaires a progressé de 3,6 %, nos marges ont bien résisté dans la plupart de nos activités, et notre carnet de commande a atteint un nouveau record historique au 30 juin 2012. Alors les choses risquent de se compliquer au second semestre compte tenu de la dégradation de la conjoncture en Europe, nous sommes donc sur nos gardes mais confiants. L’activité concessions devrait pouvoir résister à la légère baisse du trafic. Quant aux activités Contracting, le carnet de commande permet d’assurer 90% de l’activité prévue d’ici la fin de l’année. Alors les défis ne manqueront pas, mais nous sommes prêts à les relever.
EBM : Le trafic sur les réseaux autoroutiers est en baisse dans toute l’Europe, mais peut-être moins en France que dans d'autres pays comme l’Espagne ou l’Italie. Pourquoi à votre avis et pensez-vous que cela doive durer ?
Xavier Huillard : Il est indéniable que l’activité économique n’est actuellement pas très tonique en France mais néanmoins elle reste meilleure que dans les autres pays méditerranéens qui ont, pour un certain nombre d'entre eux, procédé à des coupes massives dans l’emploi, les salaires et les investissements avec des conséquences très fortes sur le moral des ménages et sur l’activité industrielle.
Par ailleurs, la France jouit d’une position géographique centrale qui en fait un lieu de destination certes, mais aussi un lieu de transit entre le Nord et le Sud du continent. Nous continuons à observer que le trafic véhicule léger est corrélé au moral des ménages et au prix des carburants, tandis que le trafic des poids lourds est essentiellement corrélé à la production industrielle.
EBM : La France s’est dotée d’un nouveau gouvernement depuis notre dernier entretien, les finances publiques ne sont pas brillantes, et l’activité économique semble ralentir. En quoi cette situation est-elle susceptible d’affecter VINCI et quels sont vos moyens d’action en la matière ?
Xavier Huillard : Le défi collectif que nous avons aujourd’hui en France, c’est de ramener la situation budgétaire et l’endettement dans les limites supportables, et notamment les limites fixées par l’UE, et de faire cela sans étouffer l’activité économique. Sinon, vous finissez par créer un cercle vicieux à base de croissance négative, et donc de diminution des recettes fiscales et enfin de détérioration des finances publiques.
Nous subissons depuis l’année dernière une majoration exceptionnelle de 5% de l’impôt sur les bénéfices dû par les sociétés françaises d'une certaine taille. Et le nouveau gouvernement en France a annoncé une série de mesures qui pourraient entraîner une hausse supplémentaire de nos charges, comme la hausse du taux du forfait social, qu'il est prévu de passer de 8 à 20%, et la taxe de 3% sur les dividendes. Ces mesures impacteraient notre résultat de quelques dizaines de millions d’euros que nous ne pourrons sans doute pas entièrement compenser par des économies.
EBM : La prise de commandes du Groupe s’est avérée vraiment impressionnante ces derniers trimestres et sauf erreur de ma part, le carnet de commandes a atteint de nouveaux sommets trimestre après trimestre depuis juin 2011. Se pourrait-il que VINCI ait eu les yeux plus gros que le ventre et comment voyez-vous l’activité commerciale à terme ?
Xavier Huillard : Oui c'est vrai notre carnet de commandes est à un niveau historique et c’est très bien car les nouveaux projets pourraient être plus rare, et il était donc important pour nous d’engranger des succès le plus possible sans pour autant sacrifier nos marges.
Notre carnet est, davantage que par le passé, constitué de projets qui se déroulent sur plusieurs années et là encore c’est très bien car cela améliore la visibilité sur les années 2013 et suivantes. Les prises de commandes pourraient se réduire dans le courant du deuxième semestre. Nous devons suivre cela avec réalisme et réactivité en adaptant nos structures opérationnelles et nos forces de production, si cela se révèle nécessaire.
EBM : VINCI a déclaré au marché que la société prévoyait une légère croissance de ses revenus cette année et qu'elle vise un niveau de marges proche de celui de l’année dernière. Qu’en est-il dans ce domaine aujourd’hui ?
Xavier Huillard : Adrian, il est indéniable que nous sommes face à une situation qui est plus préoccupante qu’il y a six mois: à la crise des dettes souveraines de plusieurs pays de la zone euro s’ajoute une détérioration de la conjoncture mondiale. La plupart des Etats européens mènent une politique de réduction de leurs déficits publics. Et je vous ai déjà fait part des nouvelles mesures gouvernementales qui risquent d'alourdie les charges sociales et la fiscalité en France.
Dans ce contexte, ce que nous pensons c'est que sur nos réseaux autoroutiers, nous devrions connaître une légère baisse du trafic sur l’ensemble de l’année 2012 mais qu'elle devrait être compensée par les évolutions de tarifs et par la montée en puissance du Duplex A86. Dans le Contracting nous avons actuellement un niveau très élevé du carnet de commandes et nous devrions par ailleurs bénéficier des effets positifs de la croissance externe intervenue en 2011 et en 2012. Au niveau global du Groupe, nous estimons donc toujours réaliste de viser une légère progression de notre chiffre d’affaires en 2012.
Nous visons par ailleurs un résultat opérationnel proche de celui atteint en 2011 et il en est de même pour le résultat net si on veut bien raisonner avant la probable augmentation des charges fiscales et sociales prévues par notre nouveau gouvernement. Au delà de 2012, le plan de charge en 2013 de certaines de nos activités dans le Contracting pourrait être impacté s’il y a un ralentissement dans les prises de commande, en particulier en provenance des collectivités locales. Mais grâce à notre base de coût en grande partie variable, nous continuerions de privilégier les marges sur le volume d’activité. Dans tous les cas notre ambition est de nous adapter, mais tout en développant notre stratégie de croissance.
EBM : Xavier Huillard, Président-directeur général de VINCI, je vous remercie.
Xavier Huillard : Merci.